Anisunas

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Saturday, August 04, 2012

A quand notre majorité?




Il y a des minorités réelles et des majorités réduites à la minorité. Cela n’a jamais importé dans l’histoire. Des peuples sont allés faire des guerres en pensant triompher facilement d’un ennemi de loin inférieur en nombre, et ont été défaits. Et d’autres se sachant inférieurs en nombre ont eu recours au courage et à la ruse pour venir à bout de leurs ennemis en surnombre. Toutes les civilisations ont commencé par l’action d’une minorité. La civilisation vient justement pour mettre les peuples d’accord entre eux, les fédérer sous un même étendard, pour mener une action commune qui est au-dessus des préoccupations ordinaires, synthétisant les efforts pour créer une ambiance à la création de laquelle le minoritaire ne se sent pas moins impliqué.
Quand la civilisation s’écroule, épuisée, il est normal que l’unité créée par la société s’envole en morceaux, chacun se croyant lésé. Dans l’histoire, il n’y a que des minorités qui… accèdent à leur majorité avant de retomber dans l’oubli, parfois.
Tous les problèmes humains (guerres, racisme) résultent de l’absence d’un principe unificateur.

Notre époque caractérisée par le mensonge, la désinformation et la promotion des valeurs inférieures a voulu élever au rang de principe moral le droit des minorités. L’idée est en apparence belle et juste. Mais c’est une idée  relevant de la rhétorique humanitariste qui a été pensée comme une énième peau de banane sur laquelle on veut nous faire glisser, nous autres les musulmans. C’est encore une de ces idées fausses que l’on sème sur notre chemin pour nous retarder. On cherche à étouffer dans l’œuf l’aspiration de plus en plus perceptible et crédible de nos peuples à renaître, à respirer enfin l’air de la grandeur, de la civilisation.
''Ils'' se mobilisent pour prétendent-ils nous protéger de nos dictateurs. Ils se comportent comme nos nouveaux tuteurs, eux qui hier encore occupaient nos pays et y agissaient à leur guise, sans foi ni loi. Depuis que les peuples arabes font montre de leur désir d’accéder à la majorité, on cherche à leur imposer le bon chemin à suivre pour mener à bien leur ‘’printemps’’. On veut leur imposer la vision de la bonne ‘’démocratie’’, et leur persuader que le moment n’est pas encore venu pour eux de voler de leurs propres ailes.
On ne nous protège pas ; on veut nous tenir loin de toute idée de grandeur, c’est à dire d’accéder à notre majorité. ''Ils''' voudraient que nous ne soyons jamais que des éternelles minorités, toujours dépendants d’eux. Même la grande Egypte est réduite à téter le sein toxique de ‘’l’aide’’ américaine !
Ceux qui au grand jour font mine de promouvoir la défense des minorités ont agi et continuent d’agir secrètement sur un principe diamétralement opposé et avec des visées claires : empêcher que les vraies minorités qui se soulèvent de nos jours ne parviennent à leurs buts, en les subvertissant, en les anticipant. Tous ces voyous qui croient appliquer l’islam  à Timbouctou en détruisant des monuments, et qui terrorisent la population syrienne en croyant mériter le paradis, agissent en réalité dans le but contraire aux intérêts de l’islam et de l’arabisme.
Le but des USA et de leurs alliés est bien l’écrasement de la vraie minorité que sont les musulmans, avant qu’elle ne devienne capable de mettre en danger leur majorité, c'est-à-dire leur mainmise sur le monde musulman. Ceux qui aujourd’hui prétendent faire respecter un principe au nom de la charte des Nations-Unies, sont en train de pousser les peuples arabes à se chamailler, à s’entre-déchirer, afin qu’eux-mêmes puissent conserver le dessus et le droit de les manipuler.
Outre cela, cette prétendue défense des minorités présente le grave inconvénient de donner à la minorité l’illusion d’être réellement protégée par autrui, ce qui l’amène à se dispense de faire elle-même le nécessaire effort qui doit l’élever jusqu’à sa majorité.

Au 19ème siècle, les nationalistes occidentaux ont construit l’unité de leurs pays (Allemagne, Italie notamment) par la force, au détriment de nombreuses minorités qui composaient l’Europe.
Les pays européens peuplés de quelques millions d’habitants ont placé sous leurs autorités coloniales des centaines de peuples lointains réduits à une situation proche de l’esclavage, saccageant leurs richesses, celles des hommes et celles du sous-sol. Pendant un siècle et demi de colonisation, ils n'ont rien fait pour aider ces peuples à ‘’sortir de leur minorité’’, comme dirait Kant.
Kant cependant associe la sortie de la minorité à la civilisation. Pas celle que les bons missionnaires armés jusqu’aux dents ont apportée dans nos pays, mais celle que les peuples minoritaires entreprennent de construire pour leur propre compte.

C’est par suite de la décadence que l’on devient minoritaire, comme un effritement des énergies, une dispersion des efforts qui n’agissent plus qu’au niveau de la tribu. Le réseau des relations sociales qui garantissait l’unité de l’ensemble civilisé, se défait, et retourne à l’état où il se trouvait avant la civilisation.
La civilisation ne s’importe pas, pas plus qu’elle ne s’exporte. Il faut se mobiliser, agir par soi-même et ne pas attendre que le loup vienne vous sortir du piège, car ce sera pour vous dévorer. ‘’Les lumières’’ viennent de l’intérieur.
Il faut donc inverser le raisonnement et dire que c’est par sa faute que la minorité est minoritaire. Il ne s’agit pas de proclamer un droit nouveau pour condamner les minorités, mais de leur enseigner que l’on ne peut sortir de son mauvais état que par son propre effort. Comme l’enseigne le Coran.
La sortie de la minorité s’effectue en se fixant un but sublime qui dépasse les petites combines qui servent de politique à nos dirigeants actuels. Il faut un grand dessein pour unir les peuples et les mettre en branle. Et dès les premiers succès, cette aspiration à la grandeur va cimenter et unifier toutes les composantes sociales majoritaires ou minoritaires. Quand les sociétés voient clairement les choses, elles deviennent optimistes et dépassent leurs différends. Elles les oublient même. Les gens s’en débarrassent et les voient enfin tels qu’ils sont : des obstacles illusoires qui les empêchaient de comprendre et donc d’agir. Quand le ‘’la’’ est donné, toutes les composantes se mettent à agir à l’unisson, guidées par le principe supérieur de l’islam, sans renoncer forcément à leur particularisme : le kurde peut rester kurde, et le berbère peut  se définir berbère. Mais aucun d’eux ne subira cette sorte de minorisation entrainée par la décadence. Il gardera la tête haut, fier de servir la meilleure religion qui soit.
Si on considère que le régime de Assad est minoritaire, force est de constater que cette minorité a préféré défendre l’intérêt supérieur du Sham, alors que son intérêt de minorité était de se mettre au service des ennemis et d’accepter la paix avec l'entité sioniste. Cela aurait eu pour conséquence que son pouvoir échapperait ipso facto à toute contestation et agression
Il y a une immense différence entre un dictateur à la solde d’une puissance étrangère, et un dictateur qui veut obliger son peuple à suivre la voie de l’honneur. Je crois que c’est Fidel Castro qui a dit que son gouvernement avait le droit d’interdire aux cubains d’être des analphabètes. 
Si la Syrie arrive à se sortir de ce défi qui met en péril son existence même, elle imprimera à la mentalité arabe la conscience de son unité, en lui proposant de ne pas s’arrêter là. Il faut que le grand Shâm redécouvre la grandeur et contribue à aider les arabes à garder vivante la confiance en soi pour nous sortir à jamais de cette véritable minorité humiliante dans laquelle nous nous sommes retrouvés prisonniers depuis des siècles.
Chaque succès d’un pays entraînera le succès d’un autre. 
Pour s’éclairer davantage, je suggère au lecteur de méditer un texte du philosophe allemand Emmanuel Kant qui n’avait pas en vue les peuples de l’Orient soumis rude épreuve par les interférences incessantes de l’Occident, mais qui a eu une intuition qui s’est faite rare en Occident.
Le texte daté de 1784, est accessible sur internet. Il suffit de taper sur la barre de recherche : « Qu’est-ce que les Lumières ? Kant » pour trouver un site qui vous le propose en lecture et en téléchargement libre.
Abû al-‘Atâhiya